La fée Fip au pain sec
Aucun savoir-vivre dans les hautes sphères. A l’approche de Noël, pas question de concocter treize desserts pour les dernières locales de Fip : des mères fouettardes coupent les micros à Bordeaux, Strasbourg et Nantes. Quant aux festivités pour les 50 ans de la nationale, elles ont démarré au premier confinement avec la disparition des flashs d’info.
A l’approche des fêtes de fin d’année, nombre de Français se demandaient s’ils pourraient festoyer en famille ou entre amis. Les auditeurs des Fip de Bordeaux, de Nantes et de Strasbourg, eux, savaient qu’ils perdaient leurs radios dès le 18 décembre. Finies les informations culturelles de proximité comme les douces voix qui les animaient malgré leur chaleur inestimable en temps de froidure et pas qu’hivernale. Point de père Noël donc mais des mères sacrément fouettardes - Bérénice Ravache, directrice de Fip sous les ordres de Sibyle Veil, PDG de Radio France, soutenue par sa ministre de tutelle – qui cognent sans vergogne. Et ce, malgré le soutien du public (deux pétitions rassemblant plus 163 000 signatures), des acteurs culturels et des élus : les maires des trois villes comme les trois sénateurs des régions ont écrit à Roselyne Bachelot pour que vivent les Fip locales. En vain.
A la veille de ses 49 ans, Fip Bordeaux, une des premières stations locales à naître, a fermé son antenne alors qu’elle brillait d’une audience locale record. « Quel gâchis alors que nous assurions un véritable service public en contribuant au dynamisme des territoires ! » lâche Muriel Chédotal, animatrice et déléguée CGT. Début décembre, après une bataille rondement menée, sur les vingt-quatre salariés concernés par la fermeture des locales, les cas de trois d’entre eux restaient en suspens. Les autres partaient soit à la retraite, soit en formation ou étaient reclassés. Le soir de leurs dernières prestations, malgré le Web, j’ai pas eu le courage de les écouter nos locales et puis, c’était les 25 ans de mon grand, il me fallait être souriante…
La radio prise dans la Toile
Reste Fip nationale, créée il y 50 ans. Cette belle radio enchaîne tous les styles musicaux, les tubes comme les pépites méconnues d’hier et d’aujourd’hui. On découvre ainsi le blues créole du trio parisien Delgres qui va sortir son 2e album, on fredonne avec Juliette Greco sur « Paris couleur novembre », on s’active sur « C’est lundi ! » de Jesse Garon, quand le soir tombé, Luciano Pavarotti envahit notre cuisine avec « La Traviata ». « Sur Fip, on est toujours aux premières loges » glisse au micro une des animatrices qui sait avec les programmateurs traiter les auditeurs comme des rois. Comme ses consœurs, elle a une voix qui réchauffe en ambassadrice culturelle hors pair, nous informant sur les morceaux écoutés comme sur les arts en général, des spectacles à venir aux livres à paraître. La radio a aujourd’hui son application Internet où l’on retrouve la liste de tous les titres diffusés à l’antenne que l’on peut ranger dans nos favoris. De quoi se réjouir sauf qu’on nous invite à les exporter sur des plateformes d'écoute payantes. Une fois l’application ouverte et passée la pub plein écran (sic), on tombe sur des chaînes thématiques (rock, jazz, pop, électro…), « complètement aux antipodes de l’éclectisme de la chaîne », affirme Lionel Thompson, élu CGT au CA de Radio France. « Tout ça s’inscrit dans la volonté de développer Internet sur toutes les antennes de Radio France. C’est bien, à condition qu’on dispose de moyens propres pour le faire sans toucher à nos corps de métiers et à nos budgets. » Après des grèves sans précédent pour contrer un plan d’économie drastique de 60 millions d’euros, la crise sanitaire semble être arrivée à point nommé pour accélérer sa mise en place.
En attendant c’est là que ça se passe : https://www.fip.fr/